« c’est quand même pas compliqué, pour un mec, de faire un enfant à une fille, que je sache. »

Violaine Bérot a écrit, avec Tout pour Titou, un roman aussi terrifiant que poignant. On se retrouve vite piégé dans cet entrelacs de voix, glaçantes, bouleversantes ou troublantes, d'une mère trop aimante, d'un Titou paumé, et de l'Autre, ahuri.
Un récit court et haletant, d'une noirceur éblouissante.

La Mère
Deux d’un coup !
Ce salaud m’en a fait deux d’un coup !
Je voulais un enfant, c’est quand même pas compliqué, pour un mec, de faire un enfant à une fille, que je sache. Mais il a fallu qu’il fasse le généreux, qu’il en rajoute.
Deux d’un coup...
Je l’aurais assommée, l’autre cruche en blouse blanche, quand elle m’a annoncé ça, le sourire aux lèvres.
Je suis rentrée chez moi.
J’allais pas fort du tout.
Dans ma chambre y avait le berceau de Titou, et les rideaux tout neufs, le petit nounours très doux, le meuble avec les affaires de mon enfant bien pliées dedans.
J’allais vraiment mal.
Je me suis allongée pour essayer de me calmer. J’ai posé les mains sur mon ventre. J’ai senti Titou bouger. J’étais sûre que c’était Titou et pas l’autre.
L’autre, il avait plutôt intérêt à pas broncher.
Si je résumais la situation, j’avais pas l’embarras du choix.
Titou, c’était mon fils, celui que j’avais voulu. Donc pas question d’avorter. Je l’avais, Titou, dans mon ventre, et jusqu’à l’accouchement, juré, il y serait au chaud.
L’autre, si j’avais connu une ruse pour le faire disparaître, sûr que je l’aurais fait immédiatement.
Mais j’en trouvais pas, des ruses, qui zigouilleraient l’autre sans abîmer Titou.
Il me restait plus qu’à attendre.
J’ai parlé à Titou comme je faisais toujours. Il leur faut de l’amour aux enfants pour grandir. Peut-être, l’autre, de jamais être chouchouté ça le ferait crever. C’est ça que je me suis dit pour calmer la colère.
J’ai mal dormi cette nuit-là. Ça m’avait fichu un drôle de coup cette nouvelle.
pp. 13/14

D'autres extraits de Tout pour Titou sont disponibles sur le site.

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