« qu’il surgisse, ils grondent, aboient, attaquent »

Une autre naissance à fêter en même temps que l'anniversaire des éditions Lunatique : celle de L'Apparition, le nouveau roman de Perrine Le Querrec
Lecture croisée et table ronde au programme, donc, pour assister à cette 
« Apparition ».
À défaut d'un beau gâteau crémeux, Perrine nous régalera, en duo avec la comédienne Gersende Michel, d'une lecture croisée aux alentours de 18h30. 
S'ensuivra une discussion sur le passionnant et jamais résolu mystère de : « Poésie et prose, l'impossible séparation ».


Dans le village l’eau court ainsi que les poules, les petits cochons, les moutons, les chèvres et vaches avec leurs clochettes. Les maisons, rectangles de pierre enfoncés dans
la terre, attendent au bord des routes. Ni eau courante ni chauffage, une cuisine enfumée sous la grande cheminée dans laquelle se passent les soirées. On s’éclaire au soleil, à la lune et aux orages. La porte d’entrée n’est pas sur la façade mais sur le côté obscur. Pour entrer, franchir un porche noir encombré d’outils et de bois. La fenêtre principale de la cuisine surveille le chemin et l’arrivée du visiteur. S’il se profile, les chiens bavent ; qu’il surgisse, ils grondent, aboient, attaquent. L’ennemi c’est l’inconnu.
Le danger surplombe, les balcons se défont, il pleut de la poussière de pierre. Un peu d’électricité, quelques heures le soir, miracle moderne au cœur de la faille. Charrettes, puits, lavoir, quand d’autres, juste Au-Delà, sont voitures, pétrole, machines nombreuses, vitesse. Ici-Bas pas un seul moteur, le cuir des bêtes, les roues de bois, les muscles des hommes, les mains des femmes, les heures de marche, les alpages lointains.
Ce n’est pas la résurrection d’un temps, c’est le temps même. Intemporel. éternel. Indéfini. Une mémoire calcaire. Ni d’hier, ni d’aujourd’hui. Simplement, ça dure.

p. 14

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