« au cœur de ces montagnes, dans la pénombre du jour naissant »

Dans une poignée de jours paraît Ma (dé)conversion au judaïsme, de Benjamin Taïeb. Il est donc plus que temps de réviser les fondamentaux pour savoir où l'on met les tefillin.

« Assurément, le fait d’avoir juré de respecter tant de serments devant Dieu lors de mon bain rituel a participé de la durabilité de mon implication religieuse. S’agissant de la pose des phylactères toutefois, je n’ai tenu mon engagement que six mois, compte tenu du temps que cela prenait sur mon sommeil, l’enroulement des lanières de cuir se faisant à l’aube et nécessitant, outre la prière, une certaine préparation. Une fois pourtant, je les amenai avec moi dans un centre de vacances, à la montagne. Était-ce parce que je venais d’accéder à la majorité religieuse, encombré de mes fraîches et éternelles promesses du mikvé, brinquebalantes dans mon esprit, ou parce que j’avais dû écouter dans le trajet aller du train-couchettes, à un âge où l’on se promet de faire une nuit blanche mais où tout le monde dort à deux heures du matin, les dizaines de blagues antisémites de ces adolescents bien sous tous rapports, dont celle qui les faisait hurler de rire à propos de la différence entre une pizza et un Juif (cinq minutes de cuisson), et alors que pendant ce même séjour nous visitions un musée dont j’ai oublié le thème mais dans lequel était encadrée et bien mise en évidence une photographie de Pétain, était-ce pour cela que je mettais tous les matins, dans une chambre partagée par des non-Juifs, mes tefillin ? Toujours est-il que l’on peut imaginer l’allure que j’avais, au cœur de ces montagnes, dans la pénombre du jour naissant, à quinze ans, avec mon châle de prière et mes lanières de cuir serrées fort autour du bras (sachant que le silence est de mise pendant la pose des phylactères), faisant ma prière à voix basse, devant les lits superposés et la mine ahurie de mes camarades de chambrée qui s’apprêtaient à partir pour leur petit déjeuner, avant de faire de la randonnée, du VTT ou du ski sur herbe. »
pp. 116/117

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