une redoutable causticité, appliquée à un mélange potentiellement détonant de quotidien, d’intime et de politique

Société à vau-l’eau et police de (grande) proximité. Glaçant et hilarant.

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J’avais déjà beaucoup apprécié son Dernier avis avant démolition, recueil de cinq nouvelles paru en 2016 chez Antidata : Protection rapprochée, novella de 50 pages parue en août 2017 chez Lunatique, témoigne à nouveau d’une redoutable causticité, appliquée à un mélange potentiellement détonant de quotidien, d’intime et de politique. Dans un univers proche, tout proche du nôtre, où l’équation sécurité-liberté bouge graduellement chaque jour, installant insidieusement dans le paysage urbain le plus anodin les signes du malaise inexorable (police, justice et chômage de masse), recyclant chaque menace en contrôle, Fabien Maréchal nous offre avec une sombre gouaille le bouleversement ⏤ invisible d’abord et plus flagrant ensuite ⏤ qu’apporte l’installation d’une nouvelle annexe policière dans le sous-sol d’un couple quarantenaire et pavillonnaire en diable.
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Usant par moments du trait épais des caricatures de trottoir, l’auteur condense en farce glaçante les travaux sérieux que l’on trouverait aussi bien dans La politique de la peur de Serge Quadruppani que dans, par un tout autre angle, Les états et empires du lotissement Grand Siècle de Fanny Taillandier, dans Zone de combat de Hugues Jallon que dans Fabrication de la guerre civile de Charles Robinson, construisant sa fable grinçante dans les interstices des appels désormais presque permanents au patriotisme, au civisme et à la coopération (« Merci pour elle ») que l’état réputé de guerre face au terrorisme d’une part, face à la mauvaise volonté évidente de tous ces « profiteurs du système social » d’autre part, semble chaque jour légitimer davantage.


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