«  et là ô miracle de la science, ô prodiges du docteur Frankenstein, ça marche »

À bon chat bon rat

Le docteur Frankenstein, ce génie qui a cloné le fromage à deux têtes, qui a inventé une main artificielle à deux pouces (pour se les tourner sans l’aide d’une seconde main), est bien ennuyé : le monstre dont le crâne est sommairement cousu qu’il a jadis enfanté s’ennuie après avoir passé des heures à confectionner des trolls en origami.
« Mon monstre a besoin d’un compagnon » se dit-il car Frankenstein n’est pas la moitié d’une buse. Mais où trouver de vieux débris dans tout le fourbi qui remplit son laboratoire, au milieu des rognures d’ongles de pieds et des globes oculaires qui flottent dans un seau rouillé ?
C’est alors qu’il aperçoit dans la gueule de son chat Igor, un horrible matou qu’il a dû ainsi nommer parce qu’il ressemble aux frères Bogdanov s’il n’y en avait qu’un seul, les restes pendouillant d’un rongeur non identifié, ni rat, ni gondin, ni musaraigne, ni rien de tout ça…
Toc toc se dit Frankenstein en se tapant le front, comme chaque fois qu’il a une idée de génie, je vais faire surgir une vie nouvelle de ce truc immonde. Et il bouche les trous du devant de l’animal avec des morceaux de son derrière puis remplace les morceaux de son derrière avec des bouts de son devant.
Comme il est un peu mégalo, il décide de baptiser sa nouvelle créature Frankentruc en hommage à lui-même.
Il ne lui reste plus qu’à recoudre le tout et à brancher le corps inerte de ce petit animal sur le secteur et hop ! le docteur lui balance un peu de jus. Éclairs, crépitements, puces qui sortent de Frankentruc en grouillant, et là ô miracle de la science, ô prodiges du docteur Frankenstein, ça marche.
ZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZ est le premier mot que prononce la petite créature car Jeremy Banx a un sens aigu du dialogue.
Frankenstein est super content, il a enfin réussi à affubler son monstre d’un compagnon, ses précédentes tentatives s’étant soldées par un échec. « La fiancée de Frankenstein », notamment, s’étant carapatée dès qu’elle avait aperçu la tête du monstre.
La suite est assez amusante, le monstre et Frankentruc s’entendent comme deux vieux potes tandis que l’infâme Igor ne pense qu’à rebouffer Frankentruc, car le chat est un animal cruel avec les rongeurs.
Mais celui-ci se révèle d’une intelligence stupéfiante pour un être qui était seulement mort 20 pages plus tôt et il est inutile de dévoiler les péripéties qui suivent que le lecteur découvrira.
Jeremy Banx ne manque pas d’imagination, ses dessins sont rigolos. L’auteur de ces lignes doit cependant préciser qu’il n’a pas cherché à confectionner des trolls en origami en suivant le mode d’emploi qui est donné en appendice avec 67 dessins explicatifs. Mais un enfant de 7 à 97 ans devrait  y parvenir pour peu qu’il soit un peu bricoleur.

Scénariste et dessinateur, Jeremy Banx croque l’actualité mondiale pour le Financial Times depuis 30 ans.

Commentaires