« Rien qui puisse émouvoir la censure. »

En 1916, le lieutenant Edmond Annocque est prisonnier à Posen (aujourd’hui Poznan, en Pologne). Il écrit à sa famille, à Quimper. Le petit-fils a hérité d’un tas d’une centaine de cartes postales. Il prend une à une les missives, plus ou moins bien classées, les reproduit avec les rares fautes d’orthographe et les commente. Ecrites avec soin, dans une écriture minuscule pour ne rien gaspiller du précieux espace, elles ne disent rien, ou plutôt, elles disent le rien de ces journées vides, pareilles les unes aux autres. L’ennui, la faim, le froid, les demandes de paquets de vivres et de vêtements, les remerciements pour ceux qui sont arrivés, les conseils d’emballage, les petites nouvelles du camp, les salutations à transmettre à des inconnus, à des proches. Rien qui puisse émouvoir la censure.
Le charme réside dans les blancs de ce rien, et dans les commentaires du petit-fils qui n’a jamais connu ce grand-père, mort jeune, d’une maladie peut-être due à son internement, après avoir engendré six enfants. Rien donc, dans ce livre, qu’une affaire de regard.
Petit bout de la longue chronique croisée des derniers ouvrages de Philippe Annocque, dont Mon jeune grand-père.


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