Dessine-moi une tente...

Un homme vint se poster derrière moi dans la file, fermant ainsi la chaîne du froid. Cet homme était grand, bien plus grand que moi, à tel point que son reflet dans la vitrine n’avait pas de tête, me poussant à me retourner pour voir à quoi il ressemblait. Son visage éveilla un sentiment étrange en moi, un sentiment vieux d’au moins trois siècles. J’eus l’impression de le connaître, de l’avoir déjà vu. Je crus déceler dans ses yeux les mêmes doutes. Pourtant, jamais de ma vie je n’avais rencontré un homme aussi grand ! Comme je n’étais pas capable de me souvenir vraiment de lui, je me tournai et pris l’air de rien.
« Anna ? »
Oui, Anna, c’était bien moi. Mais lui, qui était-il ? Décidément, je ne m’en souvenais pas. Il y avait cependant dans son visage quelque chose de lointain et pourtant d’évident...
« Sébastien, Sébastien Recoin. »
Sébastien Recoin, Sébastien Recoin. Ce nom sonnait en moi comme la rue des Boutons, mais sa résonance prit très vite le ton du malaise. Non, c’était impossible. Il n’y avait pas de Sébastien Recoin dans le monde, il n’y avait plus de Sébastien Recoin.
« Sébastien, quand on était petits... »


Mauvais Potage, pp. 8/9


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