Deuxième rencontre avec Jehanne, de Violaine Bérot, sur la route qui la mène au roi Charles VII.
« Nous
avançons de nuit. Le pays n’est pas sûr. Cela ajoute quelque
chose d’irréel à notre aventure. Il fait très froid. Le ciel est
d’une pureté presque anormale.
Je
ne connaissais rien de la pleine nuit. Juste la fin ou le début du
jour. Jamais l’entre les deux.
Nos
chevaux marchent serrés les uns contre les autres, comme à la
recherche d’un peu de chaleur.
Je
me laisse bercer.
Le
froid m’engourdit. Je ne sens plus mes mains malgré les gros gants
de laine d’oncle Lascar. J’ai le nez gelé. J’ai peur de le
perdre au premier faux pas de ma monture.
Nous
ne parlons pas. Même nos chevaux semblent avancer sur la pointe des
pieds.
Nous
avons mis onze jours. Onze jours à voyager de nuit et à dormir le
jour. Onze jours glacés du plein cœur de l’hiver. Je ne me
souviens que du froid, de la lenteur de notre marche, de ces bruits
de la nuit au milieu desquels nous tressaillions en silence. De Jean
aussi, des yeux si doux de Jean, qui veillait sur moi, sans angoisse,
comme un bienheureux. »
p.
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