« Dring ! Tu entends le réveil ? Je reviens d’un long sommeil. »

« Dring !
Tu entends le réveil ?
Je reviens d’un long sommeil. De ces rêves où l’on se perd en croyant se trouver. De ces voyages qui t’emmènent de l’Autre côté. Sur les rivages d’un je, nous, tu. Tu vois comme la langue est bien faite ? D’un je nous tue.
Entre le je et le tu, le nous n’a jamais existé. On peut le retirer. Comme on enlève une poussière d’un œil en train de pleurer.
Il suffit de souffler.
Le vent de tes mensonges.
Je et tu, comme un songe.
Je tue. Et je commence par tes yeux. Parce que sans eux j’aurais su me protéger, un peu. J’aurais pu éviter de tomber dans leur vide, en croyant y voir le feu.
Je massacre avec minutie. Je glace tes paupières avec la stalactite de mon corps refroidi.
Et puis je déforme ton sourire. Jusqu’à ce qu’il vole en éclats. Jusqu’à ce qu’il disparaisse dans le brouillard givré. Et puis ta dent en or, ta petite dent sur le côté... se transforme en acier. Volumineux et oxydable. Jusqu’à te faire baisser la tête comme un coupable.
Je grave sur ta peau des mouchoirs en papier jetable.
Et je tamponne un tableau impressionniste sur ton corps. Je suggère ma réalité, je ne peux pas la décrire, pas la transposer. C’est un mélange de profane et de sacré. Je frappe, et sous les coups apparaissent les couleurs. La lumière blanche au bout du tunnel. Le noir de la peur. »
pp. 33-34
D'autres extraits de De l'amour, de Séverine Capeille, sont en lecture sur le site.


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