« mais derrière leurs masques, derrière leurs yeux craintifs, sous leurs petites joues fraîches de marmots, il y avait des élèves du collège de Buchy »

Mais les autres, mes camarades de primaire, le savaient. Élise Baudouin le savait, Vincent Billard le savait, Sandrine Granchard, Hervé Leblond et Florence Duclos le savaient. Rien de spécial ne semblait leur être arrivé. Ils se baladaient dans la cour mouillée du collège avec le plus parfait naturel, comme s’ils y étaient chez eux depuis toujours. À les regarder continuer de vivre au cœur du bâtiment hideux, on aurait dit que Sandrine Granchard avait hurlé des gros mots toute sa vie, qu’Olivier Lebichet n’avait jamais souri et que Vincent Billard crachait de la morve sur les murs depuis le C.P. Je n’en revenais pas qu’ils aient réussi à me faire croire pendant des années qu’ils étaient des enfants de l’école primaire de Morville-en-Bray alors qu’ils ne l’avaient jamais été. Même au tout début, même lorsque nous ânonnions la méthode syllabique Daniel et Valérie, ils ne l’étaient pas, ils se donnaient l’air de bambins de six ans qui n’en menaient pas large quand madame Férolle devenait toute rouge, mais derrière leurs masques, derrière leurs yeux craintifs, sous leurs petites joues fraîches de marmots, il y avait des élèves du collège de Buchy.
pp. 41/42

À lire sur le site, d’autres extraits du Collège de Buchy, le nouveau roman de Jérémie Lefebvre.

Une rencontre avec l’auteur est prévue au Café de la Mairie, place Saint-Sulpice, le mardi 30 juin, à partir de 20 h 30, dans le cadre des Mardis littéraires de Jean-Lou Guérin.

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