« Et puis, l’arrivée des hommes dans les pantalons noirs qui moulent les fesses. On se demande toujours si ce sont des gentils ou des méchants. »
Fin juillet, début août, la période de l’année qui voit les gares plus que jamais se remplir de valises poussées tirées portées traînées... oubliées par les vacanciers.
« Il
y a un bagage abandonné dans la gare.
Ça,
Jean-Marc n’aime pas. Il doit passer des annonces qui fichent la
frousse à tout le monde, ensuite ça empire avec le périmètre de
sécurité rouge et blanc : pas bon. Et puis, l’arrivée des hommes
dans les pantalons noirs qui moulent les fesses. On se demande
toujours si ce sont des gentils ou des méchants. Enfin, un grand
boum qui fait trembler l’édifice entier. La pauvre valise n’est
qu’un tas de miettes. Il va encore y avoir du retard. Le retard,
Jean-Marc n’aime pas non plus. Il aime que ses 300 trains
quotidiens arrivent et partent à l’heure, même si jamais personne
ne le remerciera pour les embûches qu’il déjoue chaque jour afin
que le miracle de la ponctualité se reproduise. Ce n’est pas
grave, il se raconte des petites histoires de voyages qui se
finissent toujours bien. Jean-Marc est un chef de gare romantique,
sans doute comme beaucoup de chefs de gare. Car c’est un sacerdoce.
On entre en gare comme on entre dans les ordres. Voilà sa vision. Il
en faut de la foi pour supporter les canicules, les tempêtes, les
trains et les hommes qui déraillent, les circulaires. Il en faut de
la foi pour faire tourner une gare qui ferme après 1 h 00 et ouvre
dès 4 h 00, pour être capable d’être sur le site en moins de
trois minutes. »
À Montparnasse, Léna Ellka, pp. 60/61
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