[À Montparnasse, de Léna Ellka est] un très court roman qui mérite sa place dans les livres qui font du
bien tout en étant intelligent...
L'histoire d'un voyageur tour de mondiste
qui décide malgré lui de faire le tour de la gare
m'a immédiatement attirée. Je ne connaissais ni l'auteur ni les
éditions, aussi n'avais-je pas d'attente particulière quant à ce
livre et ce fut ma foi une lecture agréable.
Le
personnage de Renan est touchant dans sa naïveté et sa
relation aux gens, les
personnages que l'on croise ont tous quelque chose de profondément
humain.
[…]
une bulle d'air au milieu de tous les sujets graves et
déprimants de la rentrée littéraire !
Renan
recule enfin et admire l’ensemble de son œuvre. Il sourit. Il
recule encore et s’éloigne de son exposition sauvage.
Aussitôt,
comme s’ils avaient répété une chorégraphie, les voyageurs se
mettent en branle. Un à un, ils empoignent leur parallélépipède à
petites roues. Le premier marche lentement vers la colonne grise,
comme dans un film au ralenti. Il tord le cou vers les fenêtres que
forment les photos dans les blocs gris. Le deuxième lui emboîte le
pas, un peu plus vite. Le troisième encore un peu plus rapidement.
Et
bientôt, une nuée de voyageurs attirés par la lumière et la
douceur des photos convergent. Ils se lèvent des bancs et
abandonnent leur place assise si longtemps lorgnée. Ils oublient
qu’ils ont un interlocuteur dans leur téléphone mobile, ils
regardent et ils sourient. Renan aussi sourit, et il appuie sur son
petit boîtier noir.
Les
voyageurs observent, s’interrogent, réfléchissent. Et puis, n’y
tiennent plus et demandent à leur voisin, sans y penser, que peuvent
bien faire ces gens sur les photos pour être à la fois aussi
concentrés et aussi absents. Renan appuie sur sa gâchette et fixe
ces moments d’aimable conversation entre valises à roulettes. On
voit les cils attentifs, délicatement penchés vers les sourcils
timides du voisin. On voit les cheveux qui minaudent et – pour peu
d’un vol en rase-mottes d’un pigeon – se mêleraient. Noir et
blanc, brun et brun, roux et gris. C’est beau le gris.
À Montparnasse, Léna Ellka, pp.
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