« On appelle ce hublot rectangulaire un vasistas, parce que c’est un mot qui signifie « qu’est-ce que c’est ? » et qu’on trouve la réponse à cette question en regardant ce qui se passe au dehors. »

Le héros et les autres, c'est l'histoire de Martin, qui ne sait pas comment faire avec les autres, dans toute leur quotidienne opacité, toute leur virilité ordinaire, et qui ne sait pas qui est le héros de sa propre histoire. Le héros prend la forme d'un jeune homme anonyme au cri muet, sur le point de mourir depuis un siècle, sans avoir rien demandé à personne, mais proclamé héros au milieu du square urbain d'une ville qui n'en est pas une, un peu absurde lui aussi ce square urbain à la campagne ; c'est peut-être pour ça que Martin aime ce lieu. Car Martin aime les lieux. Sa principale activité est de les parcourir, de les découvrir, de les faire découvrir. Depuis  Passerage des décombres, du même Antonin Crenn, on avait compris que les lieux sont les lieux de la découverte de soi, ou quelque chose comme ça. Le héros et les autres est un bref et beau roman qui poursuit ce chemin. Il vient tout juste de paraître aux éditions Lunatique.
L'extrait choisi pour accompagner cette chronique ne pouvait qu'être celui-ci (plus bas), où il est question de hublot... Quant au prochain ouvrage de Philippe, il paraît dans quelques jours, Mon jeune grand-père.



Chez lui, il ne manque de rien. Une ouverture est pratiquée dans le toit de sa maison de façon à laisser entrer dans sa chambre la lumière zénithale. On appelle ce hublot rectangulaire un vasistas, parce que c’est un mot qui signifie « qu’est-ce que c’est ? » et qu’on trouve la réponse à cette question en regardant ce qui se passe au dehors. Grâce à lui, Martin peut suivre des yeux la course des nuages en restant couché sur son lit. Quelquefois, un rouge-queue à tête bleue se pose sur la vitre. C’est un oiseau qui ne se rencontre pas sous nos latitudes, habituellement, mais celui-ci prend ses marques peu à peu chez Martin. Il ne vient pas tous les jours et, quand il vient, Martin lui parle. Il ne lui donne rien à manger parce qu’il ne sait pas cuisiner et, d’abord, ce n’est pas utile parce que l’oiseau se débrouille très bien tout seul. 
pp. 50/51

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