L’ouverture des frontières



« L’ensemble de ces phénomènes nous invite à une réflexion sur une autre « ouverture de frontières », celle qui touche à l’intimité. Le développement de la communication sous les formes que l’on sait, et, dans un contexte plus large, la mise en cause plus ou moins systématique des « différences », peuvent aussi bien fonctionner comme un facteur de « confusion » menaçant les identités personnelles, voire sociales.
A cet égard, le dévoilement de traumatismes sexuels – dévoilement devenu possible en raison même d’une certaine rupture des frontières installées par l’omerta familiale et institutionnelle – peut nous éclairer sur la complexité des problèmes posés par l’ouverture de soi à l’étrangeté – on devrait pouvoir dire « l’étrangèreté » – de l’autre. La violence du traumatisme n’est-elle pas directement liée à l’abolition forcée d’une frontière d’abord nécessaire à la construction, voire parfois à la conservation, de soi ? Au plan de la sexualité librement partagée, la perméabilité d’une telle frontière ne devient possible – et même désirable – que portée par un accord particulier. Autrement, le viol, non seulement menace – et éventuellement détruit – dans son intégrité intime celui ou celle qui le subit mais il le ou la prive à la fois, et parfois pour longtemps, de « l’accès » à ce qu’on pourrait appeler « l’autre de soi », c’est-à-dire celui que nous sommes au plus intime de nous-mêmes et avec lequel nous dialoguons en secret.
On pourra lire, sur ce difficile sujet, le beau, émouvant et instructif témoignage direct de Cyrille Latour dans son livre MesDeuzéleu dont il est rendu compte dans ces Cahiers (cf. p. 58) »

 

Commentaires