La Vie brûle, de Jean-Claude Leroy
Extrait :
À Alexandrie, le 18 janvier, un hommes’estimmolésurle toit de sa maison, le troisième dans le pays en ce même mois historique. Ahmed Hachem al Sayyed était unchômeur de vingt-cinq ans que la Sécurité d’Étatnous présente comme undéficient mental. Brûlé au troisième degré, il n’apassurvécu. L’islam interdit le suicide, mais, dans bien des cas de désespoir, la religion n’estplus prescriptive, certains mauvais esprits disent même qu’ellene saurait prétendre à être la solution. Les bouleversements renversent les raisons fragiles, et, ces temps-ci, dispensent leurs flots d’émotions fortes, pas mieux mesurables que les faits au moment où ils surviennent. Au Caire, le même jour, la police arrêtait un avocat de quarante ans tout près du Parlement, il portait un bidon d’essence et avait tenté de s’immoler. Il a été hospitalisé. La veille déjà, un autre homme s’était immolé au même endroit, là aussi la police a parlé d’un déficient mental.
En Algérie, en Mauritanie, pour les mêmes causes, des cas de suicide par le feu sont dénombrés. Assurément une épidémie de déficience mentale !
Peut-être toi, à distance, as-tu senti quelque chose que je ne pouvais percevoir. Tu connais mieux la société d’ici que je ne la connais. Tu connais son histoire, tu comprends sa langue, tu as vécu ici, tu y viens souvent. En plus de toutes ces causes qui paraissent évidentes, y a-t-il autre chose qui m’échappe, à moi et aux commentateurs de service ? Pourquoi d’un seul coup la vie ainsi brûle-t-elle ?
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