« Nous avions atteint le bout du monde... »

 

À paraître le 10 juin 2021 : Voyage(s), un recueil de poésie de Charlotte Monégier
92 pages, 10 €, Coll. Les Mots-Cœurs, Lunatique

Éprise de liberté, Charlotte Monégier a toujours voyagé, avec pour seul compagnon de route, un carnet dans lequel écrire, raconter ce qu’elle vivait : être sur la route, ne pas savoir où dormir le soir, faire des rencontres toutes plus improbables les unes que les autres. Au bout du monde, tout est plus fort, tout est plus intense, surtout quand on est seul et que les repères habituels ne sont plus que des points de bateaux à l’horizon.

L’écriture de Voyage(s) s’est terminée à Clichy, au début de l’année 2021, et ces poèmes traduisent l’émotion qu’elle a pu ressentir sur le moment, quand elle foulait le sol de tous ces lieux visités. Une émotion retranscrite en décalage, amplifiée peut-être aussi, et mâtinée de nostalgie pour cette jeunesse et cette liberté qu’elle aura désormais du mal à retrouver.


Retour au port

Nous avions atteint le bout du monde,

Cap des Aiguilles.

Quel vertige d’imaginer qu’au-delà de l’eau,

Il y avait de l’eau,

Toujours de l’eau,

Rien que de l’eau.

Nous étions marins, aventuriers,

Collecteurs de nuages.

Lunes et soleils s’entrechoquaient.

Nous abandonnions tout — leurres, ports, fêtes,

Orages — et voulions tout.

Des roches ciselées à l’infini des vagues

Recommencées,

Poser le temps sur un espace

Et l’arrêter.

Nous rêvions tout.

Depuis,

Nous suspendons aux coques des bateaux

L’équilibre de nos vies.

Un pied dans la terre, l’autre dans l’océan.

Le reste du corps vole comme un cormoran.

pp. 11-12


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