«  Ironique, jubilatoire et lumineux », Mon petit DIRELICON

 

Note de lecture : « Mon petit DIRELICON » (Philippe Annocque)

Posté par Hugues ⋅ 

Ironique, jubilatoire et lumineux, véritable masterclasse de second degré authentique, ce petit dictionnaire en clin d’œil malicieux à celui de Flaubert réjouira toutes les amatrices et amateurs de littérature contemporaine et de commentaire à son propos.

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Alors même que l’on se remettait en douceur de l’intense émotion littéraire et humaine provoquée par Les singes rouges à l’automne 2020, voici que surgissait, cette fois aux éditions Lunatique, comme Mon jeune grand-père en 2018, un nouveau texte, bien différent en revanche, de Philippe Annocque. Heurté peut-être quelque peu, à la longue, par la bouillie sans nom proférée à longueur d’émission, de discussion ou de sentence définitive, à propos de littérature contemporaine, l’auteur de Liquide (2009), de Pas Liev (2015) ou de Élise et Lise (2017), par exemple, qui a fait de la compréhension intime des ressorts du conformisme (sur tous les terrains, fussent-ils failles ou hauts plateaux) l’un des moteurs secrets de son œuvre, nous offrait ainsi en mai 2021 ce délectable petit Dictionnaire des Idées REçues sur la Littérature CONtemporaineMon petit DIRELICON en abrégé et pour les amies et amis, abécédaire joueur en diable, ne dédaignant ni les piques acérées occasionnelles, ni les subtiles boucles définitionnelles, ni les ironies décapantes ni les échappées poétiques, maniant avec brio le sens de l’absurde et de l’à-propos contre celui des convenances et des sédimentations.

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Tout en maniant avec une perfection joueuse la nécessaire composante d’hommage direct et indirect à Gustave Flaubert (le sous-titre déjà ample se finit par les mots « mais quand même un peu à la manière de Flaubert »), l’auteur distribue quelques piques qui réjouiront actrices et acteurs un peu plus proches du monde du livre, celui-ci étant pris dans son sens le plus large, et intégrant notamment l’ensemble des membres de la chaîne, des plus humbles forçats aux non-preneurs de risques les plus nantis, sans toutefois verser dans le pamphlet analytique (pour lequel la lectrice ou le lecteur pourra se reporter, par exemple, à André Schiffrin et à son L’édition sans éditeurs, à Olivier Bessard-Banquy et à son L’industrie des lettres, ou encore à Julien Lefort-Favreau et à son Le luxe de l’indépendance).


C’est toutefois peut-être, une fois assumé et bien compris le solide second degré (au minimum) qui parcourt l’ensemble du petit ouvrage, du côté des expressions toutes faites mettant en jeu le commentaire et la critique à propos d’œuvres littéraires, que la lectrice ou le lecteur se réjouira davantage encore, avec une once significative d’angoisse, pour peu que, blogueuse ou blogueur, il ou elle soit confrontée fort directement à ces questions de banalisation, de perte de sens et de piégeage des mots, ou que, « simple » lectrice ou lecteur, il ou elle compatisse aux malheurs éventuels de l’usage des adjectifs et des adverbes, de l’authentique et du captivant, du cœur et des concessions, de l’originalité et des pépites, de la performance et de la plume, ou encore du prodige et du style.

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Retrouvez ici la chronique complète de Hugues Robert, librairie Charybde.


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