« C’est des larmes cette histoire de lecture et d’écriture »

À paraître le 7 février 2024

Une invitation à déjeuner s’affiche sur l’écran du mobile, et le fragile équilibre d’une vie de famille ordinaire menace de s’effondrer sous le poids des souvenirs. Les coups, les mots, qui  n’épargnaient ni la fille ni le garçon, la colère du père, la passivité de la mère, et l’insupportable douleur d’une enfance brisée que la mort parfois tentait. Alors, elle fera comme la docteure l’a conseillé, lâcher l’affaire sinon elle va pas s’en sortir. Les poèmes ainsi s’égrènent, peignant par touches délicates un quotidien tristement oppressant, violent. Pas d’apitoiement cependant, ça a le cuir dur, un éléphant, quand bien même il se meut dans un magasin de porcelaine.

Les œufs mimosa
jaune blanc en couple
au milieu de l’assiette
un amour de printemps
un duo de fraîcheur
une joie d’odeur portée par l’arbre
du même nom
Dans le jardin breton des grands-parents
sa mère l’espérait cuistot

La famille proche se met à imaginer de rien
D’œufs écrasés transformés
elle voit un métier
Le garçon essayait d’apprendre à lire
et à écrire
c’est tout
La mère passe par les recettes de cuisine
Il est gourmand elle essaie
des recettes de cuisine à recopier
C’est laborieux c’est une souffrance
C’est des larmes
cette histoire de lecture et d’écriture
et cette histoire d’école un calvaire
Le garçon plus tard se sent exclu
Je peins car l’écriture m’a été interdite
Dans le même temps la sœur gratte
des carnets
Plus tard elle se demande C’est moi la voleuse
j’ai volé l’essentiel à mon frère
césure
fêlure
Frère sœur jamais liés
ne se voient plus depuis longtemps
et s’il lisait ce poème le frère
il dirait Foutaises ou N’importe quoi
Elle se prend pour qui à écrire
En attendant l’un peint l’autre écrit
sans jamais se croiser

pp. 25-27

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